La tech, un moteur de démocratisation pour l’éducation ?

La digitalisation et la distanciation forcées durant la pandémie ont permis au secteur de l’enseignement d’expérimenter différents usages numériques, qui préexistaient à la crise mais restaient très peu utilisés, comme les plateformes de visioconférence ou les systèmes de gestion d’apprentissage, qui facilitent l’accès aux ressources pédagogiques et la communication entre élèves et enseignants. Phénomène intéressant, de nombreuses technologies « anciennes » comme la radio et la télévision sont revenues sur le devant de la scène, couplées à des outils plus récents comme les messageries instantanées de type WhatsApp, pour remettre de l’interactivité dans la classe à distance. Une révolution des modes d’enseignement, donc, qui n’est pas loin d’avoir révolutionné – du moins temporairement – l’approche pédagogique elle-même, car pour mobiliser les élèves et les rendre acteurs de leur apprentissage, certains enseignants ont adopté des méthodes qui pourraient se rapprocher de la classe inversée, par exemple.

Retour au présentiel… et après ?

La situation hors norme de fermeture des écoles a bien sûr pris fin et l’on constate dans l’ensemble un retour aux modes traditionnels d’enseignement, à nuancer selon les régions du globe. Cela signifie-t-il pour autant que rien n’a changé ? La graine est plantée : nous le savons désormais, la technologie peut radicalement modifier nos façons d’enseigner et d’apprendre, et nous permettre de réinventer l’école de A à Z, possiblement pour le meilleur. L’évolution du secteur est donc à observer de près.

Quel avenir voit-on alors se dessiner pour l’éducation ? Plusieurs scénarios prospectifs sont envisageables. Passons rapidement sur celui où les choses reprennent peu ou prou comme avant la pandémie, pour nous intéresser aux scénarios impliquant des changements significatifs. D’abord, nous pourrions tout à fait imaginer que la salle de classe prenne la direction empruntée avant elle par l’automobile. En apparence, votre voiture ressemble assez à celles d’il y a vingt ou trente ans, mais en réalité, elle s’est progressivement équipée de capteurs, caméras et autres objets connectés qui la rendent « intelligente », multifonctionnelle et améliorent considérablement votre expérience de conduite. De même, la classe pourrait devenir de plus en plus connectée, ce qui permettrait aux enseignants, grâce à l’intelligence artificielle (IA) et à l’exploitation des données, de renforcer la personnalisation de leur stratégie pédagogique et de mieux s’adapter aux besoins spécifiques de chaque élève.

Ensuite, le rapport de l’école aux notions d’espace et de temps demande à être questionné. La généralisation du télétravail dans la société ne pourrait-elle s’appliquer aux enseignants ? Il faudrait alors réinventer le rôle de l’école comme lieu, ainsi que les différents temps de l’apprentissage et l’autonomie laissée aux élèves. Dans ce scénario, c’est une école hybride et plus fluide qui voit le jour.

Des technologies au service d’une école plus personnalisée et plus inclusive

Personnalisation, hybridation… Les solutions développées, on le voit, visent souvent à améliorer les conditions d’enseignement et donc, la qualité de l’apprentissage. Cela fait par exemple plusieurs décennies que les chercheurs travaillent sur des systèmes de tutorat intelligent. Véritables assistants éducatifs, ces outils basés sur l’IA permettent, via la récolte et l’analyse d’informations, d’épauler les enseignants dans leurs prises de décision. Ils ouvrent la voie à un enseignement plus individualisé, mieux adapté à chacun, et en fin de compte, plus inclusif.

Car l’inclusivité et l’équité à l’école sont aussi des enjeux fondamentaux, auxquels tentent de répondre les acteurs de l’EdTech. Des technologies comme les systèmes d’alerte précoce, dont l’usage commence à se répandre, contribuent par exemple à la prévention du décrochage scolaire, qui touche souvent les élèves les plus défavorisés. En mesurant la motivation et l’engagement de l’élève, l’outil permet le cas échéant d’alerter l’enseignant et de déclencher les actions adéquates. Des solutions émergent aussi pour favoriser l’inclusivité vis-à-vis des handicaps. Détection et accompagnement des élèves dyslexiques, surtitrage à l’attention les élèves sourds ou malentendants, technologies « speech to text » pour les aveugles et malvoyants… Autant d’exemples qui montrent l’apport du numérique à l’école.

Bref, au-delà de permettre aux établissements de résorber une partie de leurs coûts et de booster l’efficacité de leurs process, la technologie est un fabuleux moteur de démocratisation pour l’éducation, favorisant l’inclusion de nouveaux publics et la formation à de nouvelles compétences essentielles pour naviguer dans le monde d’aujourd’hui.

Une action collective à mener

Bien sûr, de telles évolutions ne vont pas sans risques, sans craintes, ni sans défis. Au-delà des questions du financement et de l’efficacité des solutions technologiques, voici quelques questions auxquelles les décideurs publics doivent réfléchir. Comment protéger les données ? Quelle gouvernance définir pour la gestion de ces données ? Et d’un point de vue technique, quels standards d’interopérabilité mettre en œuvre ? Sans compter la peur ancienne de voir la technologie remplacer l’humain, y compris dans la salle de classe. Que l’on se rassure : ce n’est pas la direction prise par l’EdTech jusqu’à présent ! Tâchons d’éviter le scénario d’une peur sociale du numérique qui nous pousserait à réfréner toute innovation et tentons de trouver un terrain d’entente entre secteurs public et privé. Tout l’enjeu, pour les gouvernements, est de parvenir à une réglementation intelligente, qui garantisse la vie privée, la non-publicité et le non-commerce à l’école, tout en permettant à l’EdTech de faire souffler le vent de l’innovation dans les écoles. De leur côté, les entreprises doivent absolument se nourrir d’échanges avec toutes les parties prenantes, pour répondre aux besoins du secteur et accompagner au mieux le changement. La pandémie a montré la grande résilience des systèmes éducatifs, qui ont su innover et collaborer. À nous, collectivement, de poursuivre sur cette lancée.


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About the Author: Stéphan Vincent-Lancrin

Stéphan Vincent-Lancrin est Senior Analyst et Chef Adjoint du Centre pour la Recherche et l’Innovation dans l’Enseignement de l’OCDE.