La diversité dans les métiers du numérique : une histoire de représentations

À l’échelle internationale, les femmes ne représenteraient que 24 % des employés du secteur technologique, 11 % d’entre elles seulement occupant des postes à responsabilité[1]. Des statistiques alarmantes qui s’inscrivent à l’évidence dans un schéma sociétal plus global au sein duquel les stéréotypes de genre sont encore largement répandus. Des solutions existent néanmoins pour changer la donne et permettre aux femmes de participer pleinement à la transformation numérique de notre environnement.

 Des chiffres en demi-teinte

 La représentation des femmes dans la tech affiche des signaux paradoxaux : si elles sont de plus en plus nombreuses à travailler dans ce secteur, ou à s’y reconvertir, le nombre d’étudiantes inscrites dans des filières scientifiques tend, quant à lui, à diminuer. S’enthousiasmer reviendrait alors à mettre de côté une partie de l’équation. Les équipes techniques des start-up, scale-up, et des PME comptent de 12 à 25 % de femmes. Un chiffre qui tombe à 12 % si l’on considère uniquement le champ de l’intelligence artificielle. Dans ce contexte, un seul constat possible : bien qu’en hausse, la représentation des femmes dans les métiers de la tech est loin d’être systémique. Pour preuve, 47 % d’entre elles quittent même le secteur durant leurs dix premières années d’exercice.

Les femmes, oubliées du numérique[2]

 Mais comment expliquer ce déséquilibre, alors même que l’histoire de l’informatique est parsemée d’inventions féminines ? On pense ici aux travaux d’Ada Lovelace, de Grace Hopper, ou encore d’Hedy Lamarr. Ces inventrices ont tout simplement été invisibilisées, ne laissant aucune trace à suivre pour chaque nouvelle génération d’étudiantes, en manque d’exemples et de symboles leur permettant de se projeter dans des carrières scientifiques. La solution aujourd’hui ? Donner plus de visibilité aux développeuses ou « manageuses » d’équipes techniques et réduire les clichés et stéréotypes attachés à l’activité numérique.

 Multiplier les initiatives encourageant la diversité

 Pour être efficaces, les actions favorisant la diversité dans la tech, ou dans d’autres secteurs d’activité, doivent intervenir avant tout choix d’orientation des jeunes, et donc, idéalement, dès le stade de l’école. Cela mis à part, on compte aujourd’hui quelques initiatives marquantes de la part des entreprises ou des écoles d’ingénieurs. Un Pacte Parité a ainsi été signé par plus de 60 start-up françaises du French Tech 120, s’engageant notamment à former leurs managers sur les biais inconscients et leurs conséquences. Un label Cap Ingénieuses a également été créé pour promouvoir dès le plus jeune âge la mixité au sein des écoles d’ingénieurs

Il faut en outre souligner le travail des associations, qui vient en complémentarité de l’action des pouvoirs publics et de l’évolution des lois. A côté de cela, des communautés de femmes du numérique se créent (Ladies of Code, ou Duchess France, par exemple) : des groupes d’une importance considérable pour les jeunes femmes et les étudiantes attirées par la tech et qui peuvent par là-même bénéficier d’exemples proches et concrets.

Optimiser les pratiques de recrutement et incarner la diversité

Les politiques de recrutement et les stratégies de diversité et d’inclusion des entreprises font nécessairement partie des pistes d’amélioration à explorer. Mais concrètement, par quels biais les entreprises peuvent-elles gagner en mixité au sein de leurs équipes techniques ? Et comment peuvent-elles se prémunir du phénomène de « diversity washing » ? Pour commencer, les offres d’emploi doivent être rédigées de façon inclusive, et leur publication réalisée au moyen de canaux diversifiés. Il est de plus crucial de mettre en place un processus de recrutement objectif intégrant des entretiens structurés ou semi-structurés. Aussi bien en matière de recrutement qu’au sujet de leurs politiques de diversité, il s’agit pour les organisations de communiquer avec transparence et d’aller au-delà de simples déclarations d’intention. Et ces efforts de communication ne s’arrêtent évidemment pas à la mixité, mais concernent aussi le handicap, la politique parentale, ou la courbe des âges.

En résumé, les stratégies de diversité et d’inclusion ne peuvent rester un vœu pieux : aux entreprises de démontrer qu’elles les incarnent en rendant des comptes sur ce sujet. Par quelles actions commencer ? Ajouter dans les évaluations de performance des managers des objectifs liés au recrutement ou à la promotion de personnes sous-représentées. Autre piste : mettre en place des sondages annuels en vue de prendre le pouls de la composition des équipes et de leur évolution.

Encourager la mixité au sein des métiers du numérique, c’est répondre à la pénurie de compétences en informatique qui sévit aujourd’hui. C’est aussi lutter contre l’homogénéisation des outils et des produits, conçus pour une seule catégorie de personnes. Et c’est enfin donner l’opportunité aux femmes d’asseoir leur indépendance en exerçant des professions rémunératrices.


L’insight de Dell Technologies 

Diversité hommes-femmes : Dell vise le 50/50

Véronique Grunler, Talent Acquisition Manager Southern Europe & EMEA Talent Acquisition Lead for Diversity & Inclusion, Dell Technologies

Chez Dell, 31 % des postes sont occupés par des femmes. Un chiffre qui nous place dans la fourchette haute du marché mais qui ne nous satisfait pas pour autant. En matière d’inclusion et de diversité, le Groupe s’est fixé des objectifs ambitieux : les femmes doivent représenter 50 % des collaborateurs et 40 % des dirigeants d’ici 2030.

Pour cela, nous avons mis en place différents programmes destinés à attirer un plus grand nombre de femmes dans l’entreprise, sous le label « New horizons ». Notre partenariat avec Pôle Emploi et l’Afpa (Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes) nous permet de recruter des femmes qui possèdent un diplôme technique, et ce quel que soit leur niveau d’expérience. Parallèlement, dans le cadre de la « Sales Academy », nous avons initié cette année l’intégration de profils féminins plus expérimentés à des postes de commerciaux sédentaires. Un projet là encore réalisé en collaboration avec Pôle Emploi. Enfin, nous sommes également partenaires de la Fondation FACE (Fondation Agir Contre l’Exclusion) dont le programme « Wi-Filles » a pour but de donner envie aux jeunes filles de s’orienter vers les métiers du numérique.

Nous gardons à l’esprit que l’atteinte de ces objectifs passe nécessairement par la fidélisation de nos salariées. Grâce à notre culture d’entreprise, nous souhaitons conserver nos talents féminins sur le long terme. Ainsi, la communauté « Women in action » mène de nombreuses actions pour valoriser la place des femmes dans l’entreprise. Nous disposons également d’un programme de développement, « Release your potential », qui donne aux talents féminins l’opportunité d’être accompagnés dans le développement de leur carrière.

Toutes ces actions ont pour vocation de montrer aux femmes que les métiers du numérique leur sont accessibles et qu’elles peuvent s’y épanouir.


[1] Rapport de janvier 2020 du Women’s forum for the economy & society « Les femmes au cœur de l’économie » :

https://www.womens-forum.com/wp-content/uploads/2020/06/Womens-Forum-Rapport-Les-femmes-au-coeur-de-l%C3%A9conomie.pdf

[2] D’après le titre de l’ouvrage d’Isabelle Collet, « Les oubliées du numérique », paru en 2019

About the Author: Caroline Therwath-Chavier

Caroline Therwath-Chavier est CEO de The Allyance et cofondatrice de Paris Women in Machine Learning and Data Science (WiMLDS).